
Analyse des propos de Thierry Moungalla sur la monnaie au Congo-Brazzaville
Non, critiquer la monnaie utilisée dans son pays n’est pas un délit. C’est un droit.
La liberté d’expression constitue un pilier fondamental de toute société démocratique, et elle inclut la liberté de critiquer les institutions économiques, monétaires et politiques. La monnaie nationale, ou celle utilisée à titre officiel comme le franc CFA, n’échappe pas à ce droit de regard citoyen.
1. Cadre légal international et national
• L’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques reconnaît à toute personne la liberté d’exprimer ses opinions, y compris des opinions critiques sur l’économie ou la gouvernance.
• La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, ratifiée par le Congo, garantit également la liberté d’expression.
• Même la Constitution du Congo-Brazzaville (article 23) reconnaît le droit à la liberté d’opinion.
Remettre en question le franc CFA, par exemple, n’est pas un acte de subversion, mais une contribution au débat public.
2. Critiquer n’est pas saboter
Faire une critique argumentée d’une monnaie, c’est exercer un droit civique éclairé, non commettre un acte de sédition. L’histoire économique regorge d’économistes, d’intellectuels, de politiques et de citoyens ayant remis en question des systèmes monétaires sans être pour autant des délinquants.
• Refuser de discuter du franc CFA sous prétexte de “protéger la stabilité” revient à imposer une censure économique, contraire à l’esprit du pluralisme démocratique.
• Les débats autour de la réforme du CFA, de l’Eco ou de la souveraineté monétaire sont présents dans plusieurs pays africains, y compris au sein des institutions elles-mêmes (UEMOA, CEMAC, BCEAO, BEAC).
3. Le citoyen a le droit de demander des comptes
La monnaie est un instrument de souveraineté. Si celle-ci est partagée, contrôlée ou influencée par des puissances extérieures, il est du devoir du citoyen de s’interroger, d’interpeller et de proposer.
• Critiquer la monnaie, c’est interroger la souveraineté réelle du pays.
• Cela fait partie de la participation à la vie de la Nation, que la Constitution elle-même encourage.
4. Le vrai danger vient du silence, pas de la critique
Ceux qui tentent de faire taire les voix critiques, comme cela a semblé transparaître dans la conférence de presse de Thierry Moungalla, prennent le risque de confisquer le débat public au profit d’une pensée unique.
• Ce n’est pas la critique qui nuit à la stabilité nationale, mais l’absence de débat, de réforme et de transparence.
En conclusion, on ne protège pas un pays en interdisant la réflexion. Au contraire, plus un pays accepte la critique, plus il est fort. La monnaie est un outil. Comme tout outil, elle peut et doit être évaluée, questionnée, améliorée. Et cela, sans que les voix citoyennes soient menacées ou diabolisées.
Tom Melvin BAIKI – Le 16 avril 2025
